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Dossier Pénibilité au travail

4 page(s) de lecture | Published on 12/04/21

Dossier Pénibilité au travail

Suite à la réforme sur les retraites (loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010) et aux évolutions règlementaires du 30 décembre 2016 (décrets n° 2015-1885 et 2015-1888), la notion de pénibilité au travail a été mise en avant pour les personnes exposées à des contraintes physiques particulières durant leur carrière professionnelle. La réglementation oblige l’employeur à identifier les postes de travail « pénibles » et à établir une déclaration annuelle des données sociales (DADS) ou déclaration sociale nominative (CSN) pour les agents concernés.

Cette obligation constitue l’opportunité d’engager une démarche globale d’amélioration des conditions de travail, contribuant ainsi à l’employabilité durable des agents. La notion de pénibilité au travail a été renforcée par la réforme des retraites en définissant des facteurs de risques professionnels (décret n° 2011-354 du 30 mars 2011). Cette dernière évoque notamment un départ en retraite anticipé pour les agents ayant été exposés pendant leur carrière à des facteurs de pénibilité au travail tels que :

  • des contraintes physiques marquées (manutention manuelle de charges, postures pénibles et vibrations mécaniques),
  • un environnement physique agressif (agents chimiques dangereux, milieu hyperbare, bruits et températures extrêmes),
  • des rythmes de travail (travail de nuit).

Cette évaluation devra permettre d’établir une traçabilité de l’exposition des agents dans le temps et de mettre en place des solutions d’amélioration de manière à éviter ou à limiter/réduire l’usure professionnelle.

NOUVEAU : Les évolutions prévues par la loi du 18 décembre 2013

Cette loi portant sur la réforme des retraites, prévoit :

  • la création d’un compte personnel de prévention de la pénibilité pour les salariés de droit privé ainsi que le personnel des collectivités employé dans les conditions de droit privé,
  • la création de seuils d’exposition pour définir la pénibilité des postes de travail,
  • la fréquence de la mise à jour des fiches de pénibilité.

Les évolutions réglementaires de décembre 2015 précisent que seuls les salariés du secteur privé peuvent acquérir des droits au titre de la pénibilité. Le dispositif ne s'applique donc pas aux travailleurs détachés, aux fonctionnaires, aux salariés de droit privé de la fonction publique ou aux salariés relevant de régimes spéciaux (RATP, SNCF...).

Leur exposition à la pénibilité doit néanmoins être connue. Pour ces salariés, l'employeur établit une fiche individuelle de suivi indiquant les facteurs de risques professionnels auxquels ils sont exposés au-delà des seuils. Cette fiche est remise au salarié à la fin de son contrat de travail ou au terme de chaque année civile.

Des enjeux réglementaires

La réforme sur les retraites datant du 9 novembre 2010, a introduit de nouvelles prescriptions dans le Code du travail notamment concernant la pénibilité au travail :

« L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent (…) des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ».

Elles accroissent également le rôle et les missions des membres du CHSCT : « Le CHSCT (…) procède à l'analyse de l'exposition des salariés à des facteurs de pénibilité ».

Cette loi vise à mener une réflexion sur la pénibilité aux postes de travail durant les différentes tâches effectuées, et à prendre en considération la pénibilité lors des changements d’affectation des agents, afin de leur garantir une bonne santé tout au long de leur carrière professionnelle.

Les titulaires du compte personnel de pénibilité (salariés de droit privé (ex : contrats aidés) et agents employés dans les conditions de droit privé), peuvent bénéficier de :

  • la prise en charge de tout ou partie des frais d’une action de formation professionnelle continue en vue d’accéder à un emploi non exposé ou moins exposé à des facteurs de pénibilité,
  • le financement du complément de leur rémunération et des cotisations sociales légales et conventionnelles en cas de réduction de leur durée de travail,
  • le financement d’une majoration de durée d’assurance vieillesse et d’un départ en retraite anticipé.

Pour le personnel fonctionnaire, la réglementation ayant été considérée comme plus avantageuse, et n’ayant pas de compte de pénibilité, le paragraphe ci-dessus ne s’applique pas. Néanmoins l’obligation de l’évaluation des facteurs de pénibilité, de leur traçabilité dans le temps et de leur réduction concerne l’ensemble du personnel public.

Cette pénibilité avérée est définie selon deux conditions :

  • « une exposition à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels susceptibles de laisser des traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé »,
  • des facteurs en lien avec des contraintes physiques marquées, des environnements physiques agressifs ou à des rythmes de travail (articles L. 4121-3-1 et D. 4121-5 du Code du travail, décret du 30 mars 2011).

Des enjeux humains et de santé

  • éviter et/ou réduire les accidents du travail, les maladies professionnelles, les restrictions d’aptitude ou d’inaptitude déclarées,
  • agir sur la reconnaissance au travail en considérant les divers métiers et les degrés de pénibilité.

La recherche des postes considérés comme « pénibles » et des agents concernés, ainsi que l’évaluation à l’exposition de ces facteurs, incombent à l’employeur en concertation avec les instances du personnel et la médecine préventive. Ce constat devra alors être déclaré dans la déclaration annuelle des données sociales (DADS) ou la déclaration sociale nominative (DSN)  mettant en exergue :

  • les conditions habituelles d’exposition,
  • la période d’exposition,
  • les mesures de prévention organisationnelles, collectives et individuelles mises en œuvre.

Ce document est établi en cohérence avec l’évaluation des risques professionnels, mis à jour en fonction de l’évolution du poste de l’agent, enregistré par la médecine du travail et tenu à disposition de l’agent. Pour l’employeur et l’agent, ce relevé permet de suivre et de tracer les degrés d’exposition à des facteurs de pénibilité.

Plus encore, il s’agira pour l’employeur d’être en mesure de développer les compétences et qualifications de ses agents afin d’aménager leur fin de carrière et ainsi améliorer leurs conditions de travail tant sur le plan technique, matériel, qu’organisationnel.

Le médecin du travail peut demander à l'employeur la communication des informations déclarées au titre de la pénibilité. Ces informations peuvent compléter le dossier médical du salarié.

Les facteurs de risques définis selon la loi sont les suivants :

Les contraintes physiques

Manutention manuelle de charges (R. 4541-2 du Code du travail)

On entend par manutention manuelle, toute opération de transport ou de soutien d'une charge dont le levage, la pose, la poussée, la traction, le port ou le déplacement, exigent l'effort physique d'un ou de plusieurs travailleurs.

Facteurs de risques liés : type de charge, environnement de travail, type d’action, durée, fréquence, moyens de prévention, poids de la charge. Exemples : manipulation de diable, de matériel technique (tondeuses, etc...), déplacement avec une charge...

Postures pénibles

On entend par pénible, les postures dont les articulations sont soumises à des angles extrêmes. De plus, le maintien de position(s) articulaire(s) durant de longues périodes génère des contraintes physiques locales (posture des bras sans appui, maintien prolongé d’une posture accroupie ou dos penché en avant) et globales (station statique prolongée).

Facteurs de risques liés : fréquence, durée du maintien de la position, avec ou sans charge. Exemples : travail à genoux (pose de carrelage), travail bras en l’air (peinture)...

Vibrations mécaniques (R. 4444-1  du Code du travail)

Il s’agit des « vibrations transmises à la main et au bras par des machines portatives, rotatives ou percutantes guidées à la main, et  les vibrations transmises à l’ensemble du corps par les machines mobiles (chariots de manutention, engins de chantier, matériels agricoles …) ou certaines machines industrielles fixes ».

Facteurs de risques liés : mode d’exposition, fréquence, durée, moyens de prévention, environnement de travail. Exemples : utilisation d’outils portatifs, tondeuse autoportée…

Les contraintes d’environnement

Agents chimiques dangereux (R. 4412-3 et 4412-60 du Code du travail) y compris les poussières et les fumées

Ce sont les « substances faisant l’objet d’une classification européenne ou pouvant présenter un danger pour la santé et la sécurité, certains composés chimiques qui en raison de leur forme présentent un danger pour la santé ».

Facteurs de risques liés : dangerosité, aspect du produit, type de contact avec le produit, méthode de travail, fréquence, durée d’exposition. Exemples : chargement d’une tondeuse en essence, utilisation de solvant (peinture).

Milieu hyperbare (R. 4461-1 du Code du travail)

Il s’agit d’une « activité exercée à une pression relative supérieure à 100 hectopascals ».

Facteurs de risques liés : exposition, conditions particulières d’entrée et de sortie du poste de travail, conditions environnementales d’exercice spécifiques liées notamment à la température, fréquence, durée d’exposition, port d’équipements de protection spécifiques, conscience d’évoluer dans un périmètre de dangers = « ressenti du salarié », niveau de toxicité. Exemples : travaux publics sous-marins, percement de tunnel...

Températures extrêmes

Aucune indication n’est mentionnée dans le Code du travail sur les températures maximales.

Facteurs de risques liés : température, fréquence, durée d’exposition, moyens de protection, organisation du travail, type d’exposition. Exemples : travaux hivernaux, fortes chaleurs...

Bruits (R. 4431-1 du Code du travail)

« Exposition à plus de 81 dB(A) sur 600 heures par an » et / ou  «Exposition à un niveau de pression acoustique de crête au moins égal à 135 décibels (C) au moins 120 fois par an ».

Facteurs de risques liés : fréquence d’exposition, intensité du bruit, moyens de protection à disposition, durée d’exposition, type de bruit... Exemples : utilisation de taille-haies, tondeuses...

Les contraintes liées aux rythmes de travail

Travail de nuit (L. 3122-29 à L. 3122-31 du Code du travail)

Pour la Fonction publique territoriale : « Le travail de nuit comprend au moins la période comprise entre 22 heures et 5 heures ou une autre période de sept heures consécutives comprises entre 22 heures et 7 heures ».

Pour les salariés de droit privé : « Tout travail entre 21 heures et 6 heures est considéré comme travail de nuit. Une autre période de neuf heures consécutives, comprise entre 21 heures et 7 heures incluant, en tout état de cause, l'intervalle compris entre 24 heures et 5 heures, peut être substituée à la période mentionnée au premier alinéa par une convention ou un accord collectif de travail étendu ou un accord d'entreprise ou d'établissement ».

Facteurs de risques liés : fréquence, durée, organisation, plages horaires.

Travail en équipes successives alternantes

« Tout mode d’organisation du travail en équipe selon lequel les travailleurs sont occupés successivement sur les mêmes postes de travail, selon un certain rythme y compris rotatif, de type continu ou discontinu, entraînant pour les travailleurs la nécessité d’accomplir un travail à des heures différentes sur une période donnée de jours ou de semaines » (directive européenne du 4/11/2003).

Facteurs de risques liés : fréquence, durée, organisation, plages horaires.

Travail répétitif

Il est caractérisé par « la répétition d'un même geste, à une cadence contrainte, imposée ou non par le déplacement automatique d'une pièce ou par la rémunération à la pièce, avec un temps de cycle défini ».

« Temps de cycle inférieur à 30 secondes comprenant 15 actions techniques ou plus, ou exercice d’une activité répétitive pendant au moins 900 heures par an».

La démarche projet doit permettre l’identification et l’évaluation des facteurs de pénibilité. Elle est l’occasion de relancer une démarche dynamique et participative en vue d’améliorer les conditions de travail au sens large. Cette réflexion doit également réduire les risques de maladies professionnelles, l’inaptitude des agents (…) et ainsi contribuer à l’amélioration du maintien dans l’emploi.

En d’autres termes, cette démarche projet sur l’évaluation de la pénibilité par poste doit permettre de faire un état des lieux objectif des postes considérés comme pénibles afin de réduire les expositions aux facteurs de pénibilité et apporter des aménagements ou des adaptations sur les postes de travail (au niveau technique, matériel, organisationnel ...).

Cette démarche apporte à l’employeur une vision générale de l’ensemble des postes et fonctions de ses agents. Cette cartographie est un outil supplémentaire pour agir en matière de prévention et permettre ainsi le développement de nouvelles compétences en établissant des plans de carrière adaptés aux agents.